Les imprimeurs sont inquiets, les fautes n'osent plus sortir. Elles restent dans leur coquille.
Les virgules sont susceptibles. La preuve, apostrophez une virgule : elle se vexera, point.
Entends-tu dans ma voix, là, cette vibration ? Une voix aux accents graves est une voix qui ne rit plus.
Attention, danger.
Que faire avec l'écrit qu'on pousse, quand il ne nous pousse plus ? Partir, peut-être.
Vivre sans se demander, au présent de l'indicatif. Je veux parler de celui des chemins de fer.
Oui, voilà, se laisser flotter, et bien choisir le wagon. Pouvoir se dire "il est bateau, ce train", et s'en trouver bien. Les arbres qui défilent comme des soldats, le paysage glissant comme un patineur, le ballast... Un bon livre...
Au bout, la mer.
Demain, je porte un pot de beurre salé à ma grammaire.
Demain, c'est l'avenir. Hier est un mot déjà mort.
Ne pas se retourner, alors. Il ne faut jamais participer du passé, sinon, on vit en désaccord.
Sur la ligne droite du cahier, le T du funambule, les bras bien écarté au dessus de l'univers.
Supprimez la barre, reste un I majuscule qui ne sait pas trop quoi foutre de sa peau.
Le fil n'est plus nécessaire, mais cet air de troufion inquiet, au garde à vous...
On serait tous des I majuscule ? J'ai peur.
La rue grouille de caractères. Avez vous remarqué combien certains humains sont italiques, d'autres ombrés ?
Certains ne sont rien. On leur passe au travers, caractères invisibles.
Ils parangonnent leur vertu, avec une correction parfaite.
La métaphore est la laine de la narration.
On peut la filer, et c'est bien utile.
" Dessiner une lettre" serait plus juste pour qualifier l'acte d'écrire. Les courbes féminines du A majuscule, en calligraphie... Une coquette qui s'enveloppe d'un boa.
Le B est une jolie dame de profil, enceinte jusqu'au cou.
Le C, la demi-lune qui s'infléchit et se donne des airs de timide, cachée derrière son éventail.
Mais on ne va passer ces dames en revue. On ne reluque pas ainsi des choses aussi vivantes sans un peu de réserve.
Le B.A.BA de la politesse.
Me demande bien ce que je pourrais faire quand j'en aurai marre d'écrire.
Tricoter des anaphores ? Jouer avec des hypostases ? Sculpter des anadiploses ?
Trop compliqué.
Je préfère me lancer dans l'élevage de litotes.