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Sacré job

Sacré job

Cher non-journal

Ce noir m'ennuie. Il est profond, sans âme, rongeant dans son infinitude. L'obsédant silence du rien, l'abyssal vertige du non-être, et moi au milieu comme un con.

Trop longtemps que cela dure. J'aimerais œuvrer, mais cet abîme en moi se prolonge dans une totale absence de concept. Je flotte ; je me voudrais dérive.

J'ignore; je me rêve agissant.

Je me vautre dans mon nulle part quand mon plus cher désir serait la fatigue, les yeux cernés, l'essoufflement.

Ma seule certitude est que je bats dans les ténèbres, ce qui entre nous m'aide modérément, et surtout pas à cesser de m'emmerder.

Quelque chose, pourtant... Une brise, un souffle, un effleurement. Une fêlure dans ce vide où viennent sombrer tous les vertiges, auquel j'appartiens que je le veuille ou non.

Mais, ai-je jamais voulu quelque chose ?

Le Vouloir. La clé serait là ? Comment le savoir si je n'essaye pas un minimum... Gros effort, j'en conviens, après de nombreuses éternités de paresse. Bon, je me connais : si je commence, ma première pensée sera pour le bien-non-être que j'ai quitté, et je ne serai plus qu'un vaste remord impuissant.

Certes, mais j'en aurai fini avec la vacuité. Cette salope de vacuité. L'épanouissement doit naître d'une foule de choses possibles, mais en aucun cas de la vacuité. Bon, je me lance. Ténèbres, préparez-vous à mourir.

Et d'abord, je veux du bleu sur ce noir ; "bleu" me paraît un joli mot, qui caresse l'espace et le rend moins amer. Vouloir, oui, c'est ça ; je sens que le changement s'amorce, me voilà presque fébrile, pour un peu. Un "autre chose" frémit dans le silence, glisse sur l'obscurité, en fait une vague qui se rétracte, s'étend, zèbre le vide comme une couture.

Si je voulais donner un nom à cela aussi... "sourire" ? Oui, je prends.

Pas mal, "sourire".

Donc, j'ai pulvérisé les ténèbres avec un sourire bleu.

Qu’est-ce que je m’amuse. J’aurais du commencer plus tôt.

Plus de limites : je veux du ciel sur le sourire, une vie que je puisse regarder. Des créatures de toutes sortes, ailées, ou pas, finaudes, végétales, instinctives ou abruties. Tout pour la distraction.

Enfin, surtout la Mienne.

Et là, je tiens l’idée : la plus importante de toutes, je vais la faire à mon image : lambine, velléitaire, immature et prompte à l’ennui.

Le sourire bleu se nommera Terre. La Créature, Homme.

A partir de maintenant, tout convergera vers un beau et terrible ravage.

Dieu : sacré job, au final.
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A
J'ai pris goût à ces balades le nez en l'air, quand ça me chante, quand j'ai le temps, quand ... Et voilà que je tombe sur cette variante inattendue de la Genèse ! <br /> J'aime bien quand on se figure le Bon Dieu à notre image! Ça relativise les certitudes religieuses.
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N
Dieu, bien sûr! Ou, une déesse! Un Dieu au féminin. Il faut bien ça pour commencer par le bleu, et par un sourire. Il faut bien ça pour commencer par la terre, et donc par la femme!...
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J
Oui, je conviens qu'il s'agit ici d'un masculin par défaut...Celui des lecteurs, souvent, qui transposent sur uune non-voix une imagerie.. Mais l'Entité employant le &quot;Je&quot; qui sait son genre ? Merci à vous deux.
R
Ton texte est gouleyant, comme toujours quand tu ironises, et il soulève une question qui égratigne mon vieux reste d'éducation religieuse. A croire qu'au catéchisme, j'ai confondu &quot;protestant&quot; et &quot;ronchonnant&quot;. Toujours est-il que l'expression &quot;Dieu créa l'homme à son image&quot; serait une erreur d'interprétation d'un verset disant qu'Il créa l'homme comme lui-même – c'est-à-dire à la différence de ces crétins d'animaux – capable de comprendre, de penser, doué du libre arbitre. Y compris celui de déplaire à Dieu. Et c'est là que ça devient fun pour le Créateur.<br /> Et puis, pourquoi les hommes ne sont-ils pas tous blancs, vieux et barbus, hein ? Certains poussent même le vice jusqu'à être des femmes !
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