Les draps froissés sont susceptibles.
Ils s'effacent en mille plis qui soulignent les ruptures.
Mais pourquoi dit-on "rompre avec..." quand on rompt toujours contre, ou loin de ?
Quoique.
Privez le de "avec", et le "rompre" devient martial, sonne du clairon, marche au pas.
Rompez les rangs !
Les rangs de quoi ? Vous en connaissez beaucoup, vous, des oignons à qui l'agronome dit "rompez !" avant de les sortir de terre ?
Non. Mais les oignons font pleurer. Comme les ruptures.
Et d'ailleurs, comment fait-on pour en finir avec la rupture ?
"Les gens" sont une entité vague, dont vous noterez que ceux qui les évoquent ne font jamais partie:
"Les gens sont cons, ils ne comprennent rien, bêlent, sont fous...".
Moi, ça va, merci. Je me sens intelligent(e), pige tout au quart de tour, j'existe à mort, bordel, et suis plus sensé(e) que la moyenne...
Alors qu'est-ce que je fous ici, à chialer parce que l'autre m'a dit que Machin(e) était mieux, et qu'aucun de mes rêves n'a vu le jour ?
Est-ce qu'un "je te quitte" prononcé assis nous met en rupture de banc ?
Si oui, dans quel square ?
Rompre à deux, est-ce co-rompre ? Quittons nous, je vous le dirai.
Encore que je n'en sache trop rien, je ne suis guère rompue à l'exercice.
Quand tout va bien, on ne le sait jamais. Qu'un obstacle arrive, et on s'alourdit de regret sur une vie dont on n'avait pas mesuré le prix.
L'oiseau de bonheur, qui le connaît ?
Entendu il y a peu : "moi, j'ai vite fait de repérer les faux amis".
T'as du bol, mec. Si tu savais le temps que ça m'a pris de reconnaître les vrais... Plus difficile qu'en grammaire anglaise.
Si tu as une paire de manche rangée quelque part, dis toi que c'en est une autre.
Change de tiroir.
La personne avec qui j'aime le plus à rompre, c'est moi. Des années de pratique, et toujours pas repérée comme amie, ni fausse, ni vraie.
Vais aller me coucher, tiens. Rejoindre mes draps lisses, bien repassés, mes draps jamais vexés m'accueillant sans faux-plis. Même pas des faux-plis urgents.
Demain sera le même jour.
Rompez.