J’avance sans savoir, comme on vogue. Il bruine doux sur ma vacuité, et j’imagine qu’il pourrait suffire d’élever une main pour que le monde fasse silence, sans même un murmure de rivière, une brise feuillue, un pépiement. Mais il resterait les vivants, leur respiration ensemble, cette chorale sifflante soudée par la peur et le besoin de faire savoir. Si la terre n’oppose plus d’écho, à qui pourrions-nous dire « nous sommes là » ?
Une maison longée et voilà que l’averse habille une fenêtre en robe de gouttes. Le parapluie rougeoie mon ciel ; il est pourpre, la pluie le métallise en chute serrée que son arc déployé empêche de m’atteindre. Dans le fossé un escargot dépose des traces diamantées sur un chemin tortueux comme l’intérieur d’une noix. Plus haut, une toile écartelée : l’eau si dure au tissu caresse à peine, décore gratis pro deo la toile. Ces perles inestimables ne dureront pas.
Le fil d’araignée d’une vie compte des détours compliqués, et trop de proies.
Ou pas assez.
Ces pierres de lune sur la toile sont autant de clés des merveilles, abords minuscules d’un monde hors les mailles.
À portée d’inaccessible.