Soror
Quinze ans, la grâce. Elle est perdue dans sa lecture, dans ses rêves, peut-être. Une enfance toujours là, mais prête à se pointiller, bondir dans les possibles, passer d'une rive à l'autre, un sens, puis l'autre, partir, revenir.
Ce temps à la fois prévisible, pour autant incertain, balance entre marelle et rêve d'échappée, pose son âme fugueuse pour un instant choisi, happé par le crayon vivace, aimant, d'un père qui croque comme il respire. Un père... Le nôtre. Il ne sait pas encore que je vais débouler, deux ans plus tard. Dans cette enchantée pose, il fixe en noir et blanc sa fille unique, qui le restera, au delà mon arrivée, parce qu'elle est elle, belle, aile protectrice sur ma petitesse, bien plus tard. Ce dessin me touche infiniment, pour ce qu'il dit d'elle que je n'ai pas connu, pour la grâce qui ne l'a jamais quittée, même dans sa vieillesse, où cette adolescente est restée dans le regard, le rire, l'amour de la vie.
Soror, le joli mot latin pour dire "soeur".
Il y a "or" dedans.
Tout est dit.