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La nuit en couleurs

Léger florilège de projets pour déranger les gens

Joëlle Pétillot #Réflexions-fêtes
Léger florilège de projets pour déranger les gens

Ecrire un livre abscons, dans le genre imbitable - neuf cents pages imprimées petit - et l'intituler : "Éloge du flan".

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Gros gâteau, trois convives. Prendre, en se servant la première of course, le plus conséquent morceau parmi les trois qui restent. La tête des deux autres... Une anthologie. Ça donne encore plus de goût au morceau choisi

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A propos de goût, pourquoi ne pas créer un exhausteur de dégoût ?

Quoique : à voir ou écouter le monde comme il ne va pas, me demande si ce serait utile. Devant certaines tronches télévisionnées dans leurs oeuvres vaguement Marine, le dégoût, il s'invite tout seul. Le sens de "déposer une gerbe" s'en trouve d'ailleurs sensiblement modifié…

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Répondre à un quidam flottant qui demande son chemin :

"Il n'existe pas de nombres entiers non nuls x, y et z tels que :

xn + yn = zn,

dès que n est un entier strictement supérieur à 2."

Le must : tourner les talons en marmonnant: "T'as l'bonjour de Fermat".*

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Et un jour, refuser de rendre l'âme. On me l'a donnée.

* Détail authentiquement biographique : mon frère (très ) aîné, alors en Maths-Sup et ne vivant plus à la maison, venait me garder, (bébé paraît -il aimable mais difficile à endormir) pour que les parents sortent. Il parvenait à me faire pioncer, dit-il, avec ce théorème. La face B. c'était Desargues-Sturm : "Tout faisceau linéaire de cônique définit sur une droite une division en involution. "

Eh oui.**

** Je suis devenue un mammifère purement littéraire. Je tiens à dire que pour autant, le frangin fut par la suite un excellent prof. Meilleur que baby sitter.

Emoticonne.

Joëlle Pétillot #Petite chronique des grandes hontes
Emoticonne.

L’agaçant, quand on fait partie des émotives contrôlées, c’est que personne ne vous croit si vous avouez :

- Être timide

Commentaire incontournable : « Naaaann, pas toi ! » Petit rajout, (voix étouffée) : Si ? »

- Deuxième couche : incapable de réserver au resto pendant que l’Homme cherche à se garer ? Incrédulité étayée : « mais je t’ai vue engueuler à gorge déployée devant tout le monde un préposé de musée qui te demandait de pas toucher aux tableaux… »

- Contre argument : C’est pas pareil. Je fréquente les musées depuis un bail, je n’ai JAMAIS de ma vie de télérameuse regardataire conçu ne serait-ce qu’une seconde d’effleurer une toile de maître avec mes pauvres doigts.

Bien sûr ce trou-de-balle, puissant auto-proclamé (car possesseur d’un képi ? ) s’est fait aboyer dessus ; normal. L’injustice à mon endroit comme à celui des autres me file des colères subatomiques. Alors injustice + képi…

Divine ambivalence de l’être humain blabla.

Timide tétanisée dans certains cas, marchande de harengs à d’autres.

Constat : on a beaucoup moins d’ennuis à l’état de hurleuse. En vous parlant me revient l’abruti avéré qui se croit maître du Monde (au minimum) parce qu’il ouvre ou non l’ascenseur réservé aux handicapés -et qui le refuse à un ami vénéré que j’accompagne du fait que son handicap ne se voit pas- oh, l’argument qui dénote une abyssale vacuité : ton handicap à toi, notoire demeuré dont la chétive intelligence est entamée par la certitude de ton petit pouvoir minable, n’est que trop visible.

C’était au Louvre, il y a peu. Décidément, les musées…

Mais je folâtre, revenons-en au sujet.

Je maintiens l’assertion le front haut puisqu’elle est dictée par l’expérience, la grandegueulitude provoque (si on la limite) bien moins d’effets néfastes que l’émotivité. Pour la grande gueule, s’entend.

C’est du souci, l’émotivité.

Ça fait perdre un temps fou.

Jour de printemps deux décennies plus tôt. Je me rendais dans Paris pour passer un oral de concours. Fidèle à moi-même et surtout à mes doutes, je n’avais rien foutu pour préparer cet oral, vu que j’étais persuadée n’avoir pas décroché l’écrit. Petit rappel à l’usage des non-initiés : un concours, c’est d’abord un écrit, puis un oral si on réussit l’écrit. Or, entre la date où à ma stupeur j’appris ma victoire sur l’écrit, et celle de l’oral, il y eut la Genèse… Un soir, puis un matin, sept fois d’affilée. J’espère que vous suivez.

Mon état de tension à mesure que je gagnais les lieux allait croissant. Partie avec une énorme avance pour éviter le stress du stationnement (ah, ah, celui-là, je l’ai tout le temps, merci), j’avais opté pour ma tranquillité au prix d’une exceptionnelle munificence : parking payant, souterrain, assez proche de la rue où se trouvait l’Arène. Tout alla au mieux de mes flageolantes espérances, je trouvai une place sans trop tourner, remontai à l’air libre avec une presse d’imprimerie sur chaque épaule, mais au moins avais-je le temps d’aller au troquet voisin siroter un expresso tout en tirant sur ma cibiche avec une volupté dont je ne laissai pas une miette, traduisez une élégante nonchalance relevant du flan absolu. Tendue comme une corde à linge. Pour un peu, j’avalais non seulement la fumée, mais la clope avec.

Le reste se déroula dans un édredon de ouate, votre servante en enveloppe vide formula des réponses aux questions posées par l’aréopage, se leva quand on la remercia puisque le quart d’heure règlementaire – dans mon temps à moi l’équivalent du Crétacé – se terminait.

Je gagnai ensuite le parking, direct. Même pas le petit jus de l’après. Tremblais trop.

Enfin, je me retrouvai dans l’Hadès infra-urbain où les voitures en rang serré me faisaient une haie d’honneur.

Les voitures. Mais…

Où était la mienne ?

Pas moyen de m’en souvenir. J’avais bien mémorisé l’allée, un truc comme « A », le genre abordable, mais le numéro ? Remontai tout le A. De véhicule, point. Pfuitttt.

Le lâcher-prise, celui qui réduit les gens à l’état gazeux.

Je mis un temps certain à conduire ma nébuleuse personne auprès d’un monsieur qui lisait une revue derrière un guichet vitré. Encore sous le coup de l’effet retour, je lui formulai poliment un « je cherche ma voiture » qui le laissa vacillant pendant une courte seconde. Après quoi, très pro, il me demanda ce que c’était.

Dire que j’avais pu répondre sans ciller à des interrogations du genre « quelles sont les spécificité de l’AP-HP en matière de finance » moins d’une demi-heure avant… Mais là, scotchée. C’est que voyez- vous, je n’en savais fichtre rien.

Entendons-nous bien : je me tamponnais comme de ma première layette des finances de l’Assistance Publique. Mais s’en foutre à ce point n’était rien, une rognure d’ongle par rapport à l’indifférence que j’éprouve pour les voitures. Le monsieur derrière la vitre avait mis le doigt sur ma plus éclatante incompétence.

Je me suis entendue lui retourner un : « elle est blanche » d’une voix qui l’était tout autant. Ce à quoi l’homme m’octroya avec la hauteur d’un grand commis de l’état : « Madame, ça ne me suffit pas. »

Je vous épargne le détail de la suite, restons en à la procédure.

J’ai dû ressortir à pied du parking, (alors que j’avais payé à la machine, mon temps de présence s’en trouvait compté) pour aller téléphoner dans une cabine afin de demander à mon vis-à-vis marital ce qu’on avait comme voiture. Je suis sortie triomphante de la cabine pour y retourner ensuite, parce que j’avais oublié l’immatriculation. J’ai pas mal gesticulé parce que je ne trouvais plus mon stylo, et une fois que je l’ai eu en main, je me suis rendu compte que je n’avais pas de papier, alors j’ai écrit l’immatriculation sur un talon de chèque.

Le reste se noie dans les eaux du Styx, mais je me souviens que du coup, le parking m’a coûté une blinde. Au retour, commençant enfin à me détendre un peu hors l’impression d’avoir été nullarde, j’ai mis de la musique, j’ai soupiré. Et j’ai raté la sortie de l’autoroute.

Par contre, le concours, je l’ai eu.

C’est du souci, l’émotivité.

Rapport au temps, tantan ♪♫♪♫♪

Joëlle Pétillot #Petite chronique des grandes hontes
Rapport au temps, tantan ♪♫♪♫♪

J’ai avec ce que les philosophes nomment le « rapport au temps » des difficultés, du moins aux yeux des fâcheux étriqués : ceux qui regardent leur montre.

Que l’on ne se méprenne pas : portée à la ponctualité, détestant attendre ou faire attendre, commençant à l’époque où je sévissais professionnellement les réunions à l’heure etc… les en-retard-chroniques m’ont toujours irritée.

J’insiste : je ne parle pas de l’heure.

Je parle bel et bien du temps, ce facteur diabolique qui fait les saisons et les rides, l’ombre et la lumière, le jeu des sensations.

Voilà tout le nœud de la chose : la sensation.

Elle m’a bien souvent indiqué l’heure -sans erreur, je le précise- parce que l’éclairage, quelque chose dans l’air, la couleur des choses, l’impalpable… C’est difficile à expliquer: encore plus à croire me direz-vous, ô sceptiques déjà flamberge au vent : celle du ricanement, s’entend.

Mais il m’est arrivé - ce m’est une douloureuse humiliation de le reconnaître - d’avoir des failles dans la susdite.

En clair, de me tromper de sensation.

C’était un soir d’hiver, au boulot, il y a longtemps. A l’aube de deux décennies professionnelles hospitalières. Détail ayant son importance, mon bureau, antichambre directoriale dont le seul agrément était la vue sur le beau jardin, se trouvait proche d’une sorte de porte palière ouverte sur deux autres, de bureaux.

Peut-être ne suis-je pas claire, mais l’essentiel à retenir est que les collègues œuvrant dans la pièce contiguë ne perdaient rien de mes déplacements à l’extérieur, puisque je devais, pour sortir, passer devant leur nez.

Ce soir hivernal tombait sur mes épaules. La nuit s’avançait, avec elle le cortège d’interrogations mystiques propre à l’executive femelle mammifère humanoïdale Qu’est-ce que-je-fais-à-bouffer-j’espère-kia-du-pain-ettecétéra…

Fatigue.

De fil interrogatoire en aiguille y’en- a- marre je constatai :

  1. Que l’obscurité était profonde.
  2. Que les voix des collègues prenaient ce reflet métallique signifiant " fin de journée".

Pour un peu, tous indicateurs sensoriels déployés, j’aurais senti une odeur de soupe…

Je me levai donc en soupirant d’aise, pris mon manteau à la patère, mon béret en laine itou, passai l’ensemble et claironnai un « au revoir » aux deux filles qui traînaient un peu. Toutes trois logées sur place, cinq minutes nous suffisaient pour gagner nos nids respectifs.

...............

- Tu t’en vas ?

Frémissement.

Quelque chose d'inusité dans la voix de ma collègue et amie. Une interrogation, un soupçon de…stupeur ?

Une différence, en tout cas, par rapport aux mêmes mots prononcés au même moment un autre jour.

Déjà dehors par la pensée, je répondis que oui, et souhaitai une bonne soirée.

...................

- A quatre heures et demie ????

J’ai stoppé net et me suis retournée.

Je reconnais n’avoir pas scintillé, ce jour-là. (A supposer que je scintillasse parfois).

J’ai relevé les sourcils et mâchouillé à mon vis-à-vis un navrant :

« Ben, il fait noir ».

Parce que c’était mon repère, d’habitude.

Sauf que là, au gros de l’hiver, il faisait effectivement nuit, très nuit, mais… plus tôt.

J’avais bêtement négligé ce détail.

L’amie qui l’est restée depuis a mis du temps à s’en remettre.

Mais j’ai fait attention après. Au point que même dans cette vie non professionnelle, je regarde toujours l’heure si j’ai à sortir la nuit.

Histoire d’être d’équerre.

Le petit bagnard

Joëlle Pétillot #poésimages

Petite chronique des grandes hontes -14-Embrasse moâaatchii

Joëlle Pétillot #Petite chronique des grandes hontes

On peut rater bien des choses dans cette vie: un examen, un rendez-vous, un bus, une sortie d’autoroute, un rôti, un poème. Pas grave.

Mais il en est une qui ne se peut louper, en aucune façon, jamais : j’ai nommé le baiser en général, et surtout, LE PREMIER.

Un premier baiser, c’est l’avenir qui tortille du derrière en se faisant aguicheur, la « conclusion » d’un début plus ou moins long mais toujours fébrile, et cette boucle bouclée augure de débuts frissonnants dont la seule perspective vous coule un discret ruban chatouilleur de là à là, entendez de la racine des cheveux à partir du dessous jusqu’à l’extrême pointe de l’ongle des orteils. Lesquels se doivent alors de jouer les bouquets de violettes dans la chaussure, pour peu qu’on en porte.

Voilà.

L’ordre des choses est ainsi réglé, il n’y a pas à y revenir.

En matière de premier baiser, la psychorigidité s’impose.

Tout doit être parfait.

J’ai dit.

…..

J’ai bien failli faillir, il y a longtemps.

J’avais rencontré un être exquis : profil grec, humour dévastateur, yeux mordorés et carrure. Cavalier accompli, non je n’idéalise pas, j’étais raide dingue. Ses cheveux plus que frisés se complétaient d’une fine barbe de même, il était beau tsoin, tsoin, et nous voici cheminant de concert lors d’une agréable promenade parisienne qui se termine sur un banc de square, sous un soleil automnal tchi, tchi.

Jusque-là, tout va bien.

Une minute plus tard, tout va encore mieux, nous nous embrassons. Avec fougue, je dois le dire, mais… tout soudain, je sens quelque chose.

Rapport à une infime rebiquette de moustache à lui.

Qui entre avec un culot sans nom dans ma narine droite à moi.

L’échange à peine commencé, je ne peux EN AUCUN CAS l’interrompre. Je m’accroche donc de mes dix doigts crispés à la chemise de mon vis-à-vis lequel, plutôt content de la tournure des choses, continue la procédure avec entrain.

De mon côté, je resserre l’étreinte à mort, parce que me vient une envie d’éternuer pas possible. Et pour cause, la rebiquette persiste à explorer ma fosse nasale qui frémit. J’aimerais frémir aussi, mais las, vu le contexte… Toute mon énergie s’emploie à ne pas, mais alors surtout pas exploser au pif de mon prince charmant.

Ça gâcherait, convenons-en.

Je me suis accrochée, j’ai pensé à n’importe quoi, j’ai respiré à fond.

ET … j’ai réussi. Traduction : j’ai bel et bien éternué, - vous imaginez le tsunami, vu l’effet retard- mais à un moment décent, honnête, acceptable.

Soit une trentaine de secondes après que nos lèvres fussent séparées.

Ouf.

Et alors, un qui a été super, (je parle du baiser), ça a été le deuxième.

Un velours.

Embrassez-vous comme des fous, le plus possible, à bouche éperdue, souvent, longtemps, rien n’est meilleur pour la santé.

Mais pour l’amour du ciel, avec l’assurance de naseaux bien dégagés ; ça réduit l’angoisse.

C'est maintenant

Joëlle Pétillot #poésimages

C’est une promenade où tous les temps s’amusent.

Celui qui passe, celui qu’il fait.

Soudain, la perfection du moment est telle qu’on ne vieillit plus.

Les voix tirent des bords près de l’eau, deux rives coupantes au soleil diagonal ralliant le lac battu de mouettes traversières.

Il y a bagarre, là-bas. Une guerre sans merci pour un machin qui se mange. Une guerre de canards contre les volantes voleuses, ces braillardes même pas foutues de jouer dans la cour des polychromes. Des bicolores. Ah, le mépris.

Le lac cousu de lumières ne perd pas un de ces cris et se froisse à peine. Les ailes claquent, le son monte, la note canardienne domine, rauque, mâle, un rien grotesque. Pourtant, cette nuée là-bas sous l’or qui monte, c’est de la poésie affutée, un instant de vie pleine à ras-bord, parce que rien n’y manque, ni la beauté, ni le silence claquant des rires, ni les voix assourdies par le froid des deux qui me suivent, (dans ces promenades à plusieurs, je suis souvent devant, ou loin derrière), ni la conscience suraiguë, déployée, fourmillante dans tout le corps de la perfection du moment.

 

 

Hebergeur d'image Le présent s’est osé têtu au point de refuser son devenir. Le futur du présent, c’est le passé, il le sait et n’en veut pas.

Je regarde les oiseaux, je bois le lac, j’aspire l’air, je me gonfle du moment comme une baudruche et je flotte sur la lumière-fleuve, le lac-respiration ; la brume qui naît à sa surface c’est son souffle de vivante, sa signature.

Et je flotte avec elles, hors ma peau –trop étroite-, hors mes limites terriennes, hors sol.

Le bonheur fou ne dure pas, il en perdrait son goût de trop-plein. Mais le présent s’obstine, ancré dans mon épaule, jusqu’à l’odeur de l’eau qui m’est servie en épices, et une certaine densité dans l’air, un pêcheur qui m’adresse trois phrases, « profitez de la lumière, vous avez bien raison, c’est maintenant ».

Car je photographie, bien sûr. Leurre infini propre aux humains qui s’acharnent à mettre un appareil entre eux et le monde, ignorant la plupart du temps que le sujet leur échappe. A peine le bouton pressé, il devient autre et vit sa propre vie.

 

 

 

 

 

Cet œil en bandoulière nous fait juste collectionneurs, consciemment ou non hantés par la peur du passage, la sur-conscience de l’éphémère…

Le temps de cette fin d’après-midi souple, pliable, ployable en danseuse sous un drap d’or automnal, les rides de l’eau, le froid qui mord les lèvres, le bruit de feuilles pressées sous les godillots, me fait la grâce de son immobilité.

Les canards ont fini par se taire, les mouettes par s’en aller.

Le soleil noie ses transverses dans une perdition tranquille, l’ombre a gagné.

Mais la perfection est là en résonnance, et la plus belle photo du jour, sans conteste, la plus magnifique, la plus cadrée, la plus équilibrée, la plus pure, reste celle que je n’aurai pas faite.

Elle était dans la résonnance.

La voix du pêcheur poète.

Profitez…

C’est maintenant.

 

 

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