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Hêméra esti
L’heure incertaine ou l’obscur joue à perdre contre l’aube.
Il faut dire pour coiffer un silence au poteau. Même ainsi je ne suis pas sûre qu’il meure.
Dire la nuit des choses comme une mort dont on s’éveille, le têtu à vivre, les silences glissés dans les chants d’oiseaux. L’aube grosse de tous les crépuscules de la terre, la lettre écrite du corps à l’âme « Mon amour, séparons-nous, même si je sais que de nous deux c’est toi qui t’enfuiras. »
Dire l’étoile-océan qui marche sur le ciel, masquée de plein jour.
Dire le quand même de sa beauté.
Dire le poids de l’autrement dans les regards pluriels.
Dire enfin cet hors limite de soi comme une répudiation, pour trouver, là, tout au fond, le point exact du reniement.
L’aube, cet arrêt du cœur, ce repos. Juste une île qui n’enfante que la lumière dont elle prend un peu de part.
Hêméra esti.
Contre-azur
Illustration de Suzuki-Sho-Nen, Lune.
Vivre est un appel, une convocation où l’entité répond : « absent ».
Un fleuve paré d’arbres qui le cachent, une dérive de résonance, le chant de l’eau noyé dans la musique des branches.
Les oiseaux posent, en rajoutent, saupoudrent leur note à contre-azur. Une partition où seules s’écrivent des rondes, solides, ineffaçables, sur quatre temps. Et la première d'entre elles boit en profondeur une chorale de nocturnes : questions informulées, réponses tremblotées, dialogues inconnaissables.
Comme elle demeure douloureuse, cette longue déchirure de chasseurs dans une nuit barbelée d’étoiles où il suffit de regarder pour se déligoter du paraître.