Après un certain temps écoulé non pas sans honte, (ma vie de distraite en génère à foison) mais sans honte notable, il advint donc pas plus tard qu’aujourd’hui… un message. Et tout a basculé.
Préambule : je choisis mes amis FB avec prudence, voire subrepticité ; attendant avant de répondre, allant voir ce que publie le demandeur ou la demanderesse, pesant le pour, le contre, soupesant le nombre et la qualité d’amis communs avec une ombrageuse concentration.
Parfaitement.
Lorsque le miracle de la vie a lieu, je me rapproche de certains d’entre eux au hasard d’une voix (téléphone) ou mieux encore d’une rencontre. Et si l’ami(e) ressemble à ce qu’il paraissait au cours de nos échanges sans visages, une joie ineffable m’envahit, me transperce et m’exalte.
Il y a donc, parmi mes amis FB, des gens qui sont devenus des amis pas FB. Vous voyez ce que cela signifie, je ne m’étale pas plus avant.
Second préambule :
Voici ce qui figure sur ma page en guise d’intro :
« On n'étale pas la gelée du sens sur les tartines du signifiant »
François GEORGES
L'EFFET YAU DE POÊLE
Citation délicieuse, d’un auteur qui l’est tout autant.
Or, en ce radieux matin pré-automnal, sur le rectangle irritant qui hante mes poches de temps en temps quand je ne le retrouve pas dans mon frigo vu que je passe ma vie à le chercher parce que je l’ai flanqué n’importe où, — je parle de mon portable— voici, donc, qu’un léger bip pour une fois audible me signifie justement que l’on me cause depuis Messenger.
Voyant le petit rond portant un avatar familier, je me réjouis d’avoir des nouvelles d’un bipède écrivant pas mal, celtique, horticole, littéraire, admirateur de Coltrane et d’Hugo Pratt, bref, une âme sœur amicale. L’affection me fait arborer un sourire d’une oreille à l’autre. Je prends connaissance de son envoi et mon sourire flageole :
« Dis Joëlle, tu sais qu'il y a une coquille dans ta phrase d'accueil ?
On étale pas »
Ce à quoi je réponds, car enfin on a sa fierté :
Non môssieur. Il y a négation et si phonétiquement on entend une liaison avec la voyelle, le ne... pas est bel et bien une négation. Règle grammaticale suivante :
N'oublions pas, dans la phrase négative, la négation n apostrophe après "on" lorsque le verbe commence par une voyelle ou est précédé de "y" ou de "en".
Ex flaubertien :
"On n'entend que la pluie tomber sur le pavé"
Vouali et on dit merci à monsieur Bled 😊
Je tiens à préciser le stoïcisme badin de l’échange épistolaire susmentionné, pas la moindre acrimonie entre nous.
Sur cette réponse étayée je cours vaquer.
Soudain… petit bip. Entendu par un monstrueux coup de bol, votre servante étant non seulement miro mais un poil dure de la feuille, comme le disait ma montmartroise maman.
Évidemment, je maugrée, puisque je n’ai pas le moindre souvenir d’où j’ai pu abandonner ce symbole civilisationnel urticant générateur de petits bruits. Après quelques longues minutes clôturées comme souvent par un appel depuis le fixe pour savoir où se trouve le machin, que j’entends ronronner sous ma pile de repassage, je vois que mon vis-à-vis m’a répondu et lis :
« Ben oui
Tu l'as pas mis
Hé! »
Vérification faite, (pur réflexe, je ne mets pas un instant en doute ce qu’il me dit) je constate la gorge serrée que j’avais mis en frontispice
« On étale pas… »
En clair, j’ai pris les choses à l’envers. Ce qu’il me signale comme coquille, je comprends que c’est la correction et forcément,…
J’ai parlé de nos points communs : à cela s’ajoute un bonus de taille : sa mansuétude.
Il me signale une faute, je lui renvoie une leçon de grammaire prouvant de façon éclatante à la face du monde que je connais parfaitement les règles que j’oublie d’appliquer.
Il me garde comme amie.
Quand je vous dis que je sais les choisir.